Les revendications du CFCV concernant l’accompagnement des victimes de violences sexuelles dans l’enseignement supérieur

Nous constatons des lacunes en matière de lutte contre les violences sexuelles dans l’enseignement supérieur et la recherche.

En effet, les procédures disciplinaires devant être mises en place en cas de situations de violences sexuelles ne placent pas la victime et l’agresseur sur un même pied. Ce qui peut décourager les victimes à entreprendre légitimement des démarches pour être protégées et faire valoir leurs droits.

De plus, il subsiste une distinction injustifiée entre les établissements publics et privés en matière de prévention et de traitement des violences sexuelles. En effet, les établissements  privés ne sont pas soumis aux mêmes contraintes et obligations que les établissements publics.

Tous ces manques développent chez les agresseurs un sentiment d’impunité. Nous souhaitons donc que les règlements qui prévoient des mesures en matière de lutte contre les violences sexuelles soient non seulement améliorés mais aussi applicables à l’ensemble des établissements de l’enseignement supérieur, privés et publics confondus.

 

1. Améliorer les règles qui définissent les obligations des établissements publics en matière de lutte contre les violences sexuelles, en particulier la circulaire n°2015-193 sur « la prévention et le traitement du harcèlement sexuel dans les établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche » et le code de l’éducation qui précise les procédures disciplinaires prévues

 

  • Prévenir et traiter les « violences sexuelles» dans leur globalité et pas uniquement le « harcèlement sexuel ». Le harcèlement sexuel constitue aux yeux de la loi une infraction à caractère sexuel et une violence sexuelle tout comme le viol, les agressions sexuelles, l’exhibition, etc. La circulaire n° 2015-193 du 25 novembre 2015 ne mentionne que le harcèlement sexuel. Ce qui peut, par exemple, laisser penser à une victime d’agression sexuelle ou de viol qu’elle n’est pas concernée par cette circulaire.

 

  • S’assurer de la mise en place effective dans chaque établissement de cellules compétentes en matière de prévention et de sensibilisation aux violences sexuelles. Si la circulaire demande à tous les établissements de « mettre en place des dispositifs spécifiques de prévention et de traitement du harcèlement sexuel », dans les faits, ces structures tardent à être établies. Aujourd’hui, ces cellules n’existent que dans trop peu d’établissements. Nous souhaitons donc l’application réelle des mesures de prévention prévues par la circulaire n° 2015-193 du 25 novembre 2015. Des actions de prévention peuvent être, par exemple, menées à travers la diffusion de supports de communication, des campagnes, des interventions auprès des étudiants, la formation du personnel. Ces cellules doivent aussi être en mesure de prendre en charge des victimes de violences sexuelles pour les écouter, les orienter et les soutenir.

 

  • Rendre obligatoire le déclenchement d’une enquête interne lorsque les établissements ont connaissance de faits de violences sexuelles commis dans le cadre de l’enseignement supérieur. La circulaire n° 2015-193 du 25 novembre 2015 se contente de recommander fortement aux établissements publics de déclencher une enquête interne lorsqu’ils ont connaissance de faits d’une telle gravité. L’enquête est la première étape pour que des mesures soient prises rapidement pour protéger la victime. Elle est donc indispensable.

 

  • Rendre obligatoire la mise en place par les établissements des mesures conservatoires immédiates prévues par la circulaire afin de protéger la victime et qu’elle ne soit pas pénalisée dans la poursuite de ses études. Par exemple, en modifiant l’emploi du temps de l’agresseur pour s’assurer que la victime et lui n’aient pas de cours en commun.

 

  • Veiller à ce que la victime ait les mêmes droits que l’agresseur dans la procédure disciplinaire prévue par le Code de l’éducation. N’ayant pas des droits similaires, la victime et l’agresseur ne sont pas placés sur un pied d’égalité.

 

– Permettre à la victime de saisir directement l’instance disciplinaire sans avoir recours, comme actuellement, à un intermédiaire à savoir le chef d’établissement ou le recteur.

 

– Permettre à la victime de contester directement l’impartialité de l’instance disciplinaire ou de l’un des membres de cette instance. Actuellement, dans la plupart des situations, l’agresseur a cette possibilité contrairement à la victime qui doit passer par un intermédiaire.

 

– Permettre à la victime d’avoir accès aux pièces du dossier. Aujourd’hui, seul l’agresseur a accès aux éléments du dossier.

 

– Notifier à la victime la décision de l’instance disciplinaire comme elle l’est pour l’agresseur et ce afin d’assurer la sécurité et la protection de la victime. Actuellement, la victime ne peut être tenue informée de la décision uniquement lors de son affichage public. La victime est ainsi susceptible de rencontrer, lors de cet affichage public, l’agresseur ou ses proches. Il peut également être difficile pour la victime de se rendre à nouveau dans l’établissement et de devoir prendre connaissance de la décision dans un lieu public.

 

– Permettre à la victime de faire appel de la décision de l’instance disciplinaire si l’agresseur dispose lui aussi de ce droit.

 

2. Faire en sorte que les mêmes règles, tenant compte de nos revendications, soient applicables à l’ensemble des établissements de l’enseignement supérieur (établissements publics ET privés). Aujourd’hui, contrairement aux établissements publics, les établissements privés ne sont soumis à aucune obligation légale en matière de lutte contre les violences sexuelles. Il leur revient seulement de définir leurs propres mesures dans leur règlement intérieur.